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La place de l’eau dans la construction durable : gestion, récupération et valorisation

La gestion de l’eau, un pilier incontournable de la construction durable

Dans le contexte actuel de changement climatique et de raréfaction des ressources naturelles, l’eau s’impose comme un élément central dans la réflexion autour de la construction durable. Si l’efficacité énergétique et l’utilisation de matériaux écologiques dominent souvent les débats, la gestion de l’eau dans les bâtiments représente un enjeu tout aussi crucial.

La préservation de la ressource en eau passe par trois leviers : une gestion sobre de sa consommation, la récupération des eaux pluviales et la valorisation des eaux grises. Ces approches permettent de réduire l’empreinte hydrique des bâtiments tout en anticipant les défis environnementaux à venir.

Réduire la consommation d’eau potable dans le secteur du bâtiment

Dans un bâtiment traditionnel, les usages domestiques (WC, lavage, cuisine, hygiène) sont alimentés exclusivement en eau potable. Pourtant, une grande partie de ces usages ne nécessitent pas une qualité d’eau aussi élevée. C’est pourquoi optimiser la consommation d’eau potable est devenu essentiel dans le bâtiment durable.

Voici quelques stratégies clés :

  • Installation de robinetteries à faible débit (mitigeurs thermostatiques, aérateurs, douchettes économiques)
  • Systèmes de double-chasse pour les WC réduisant de moitié le volume d’eau utilisé
  • Suivi des consommations via des capteurs connectés pour détecter les fuites et piloter les usages
  • Choix d’équipements électroménagers labellisés à faible consommation en eau

Plusieurs labels encouragent ces pratiques, comme le label HQE (Haute Qualité Environnementale) ou encore le label BREEAM, qui intègrent des critères liés à la performance hydrique du bâtiment. À l’échelle d’un projet immobilier, ces pratiques permettent de réduire de 30 % à 50 % la consommation d’eau potable.

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Récupération des eaux pluviales : une ressource sous-exploitée

La récupération des eaux de pluie est un levier incontournable pour limiter le recours à l’eau potable pour certains usages. L’idée est simple : collecter l’eau de pluie tombant sur les toitures, la stocker dans une citerne et l’utiliser pour les besoins ne nécessitant pas une qualité d’eau sanitaire.

Cette ressource gratuite et relativement abondante selon les régions peut être utilisée pour :

  • L’arrosage des espaces verts
  • Le nettoyage des sols ou des véhicules
  • L’alimentation des chasses d’eau

Un système classique comprend :

  • Une surface de collecte (généralement le toit)
  • Un filtre pour retenir les débris végétaux ou autres polluants
  • Une cuve de stockage (enterrée ou hors-sol)
  • Une pompe et un réseau secondaire de distribution

L’installation d’un tel système doit respecter les normes en vigueur, notamment l’arrêté du 21 août 2008 relatif à l’usage de l’eau de pluie à l’intérieur des bâtiments. Il est essentiel que le réseau d’eau de pluie ne puisse en aucun cas être connecté au réseau public d’eau potable, pour éviter tout risque de contamination.

Valorisation des eaux grises : une solution innovante et complémentaire

Les eaux grises désignent les eaux usées peu chargées en polluants issues de la douche, du lavabo ou du lave-linge. Contrairement aux eaux noires, elles peuvent être réutilisées pour certains usages après un traitement adéquat. C’est une piste encore peu répandue en France, mais en développement dans les bâtiments neufs efficaces.

Le principe consiste à :

  • Récupérer ces eaux au plus proche de leur source (via un réseau séparatif)
  • Les faire passer dans un système de prétraitement (filtrage et désinfection par UV ou microfiltration)
  • Les réinjecter dans le bâti pour alimenter les WC ou l’arrosage des plantes
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Des systèmes compacts, conçus pour l’habitat individuel ou collectif, existent désormais sur le marché. Leur amortissement est possible à moyen terme dans les zones soumises à des tarifs élevés de l’eau ou dans les constructions certifiées écologiques où les économies de charges sont valorisées.

Un enjeu urbain : infiltration, désimperméabilisation et cycle de l’eau

Au-delà du bâtiment lui-même, la gestion durable de l’eau s’inscrit dans une approche plus globale de gestion du cycle de l’eau en milieu urbain. L’imperméabilisation des sols urbains accentue les ruissellements, les risques d’inondation et d’engorgement des réseaux d’assainissement. La construction durable intègre désormais ces risques en optant pour des solutions de désimperméabilisation :

  • Pavage drainant pour les voiries et espaces extérieurs
  • Bassins d’infiltration ou noues paysagères pour ralentir l’écoulement
  • Toitures végétalisées favorisant la rétention
  • Réduction du bétonnage et végétalisation des talus

Ces actions permettent de restaurer un cycle naturel de l’eau en ville, en favorisant l’infiltration dans les nappes phréatiques et en réduisant les flux d’eaux usées à traiter. Elles contribuent également au confort urbain (réduction d’îlots de chaleur, embellissement du cadre de vie).

Une eau valorisée, pour un habitat résilient

La prise en compte de l’eau dans la conception bioclimatique d’un bâtiment va au-delà de la simple réduction de consommation. L’eau devient une ressource qu’on capte, stocke, utilise et restitue intelligemment. Cette approche systémique permet de construire un habitat plus résilient face aux aléas : périodes de sécheresse, inondations, évolution des tarifs de l’eau ou réglementations à venir.

Des dispositifs innovants soutiennent cette dynamique :

  • Systèmes domotiques de gestion intelligente des consommations hydriques
  • Capteurs connectés d’humidité des sols pour ajuster l’arrosage automatiquement
  • Toitures multifonctions combinant végétalisation et récupération de l’eau
  • Traitement par phytoépuration adapté à l’habitat diffus
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Ces innovations s’accompagnent souvent d’une approche participative avec les occupants. Comprendre, mesurer et maîtriser sa consommation d’eau devient un acte de sobriété volontaire. À ce titre, la pédagogie autour de la gestion de l’eau et la transparence des systèmes sont aussi fondamentales que la technologie elle-même.

En somme, pour qu’un bâtiment soit réellement durable, la gestion de l’eau – de sa source à son évacuation – doit être pensée dès la conception. Elle implique une diversité de techniques, une adaptation au contexte local et une sensibilisation des usagers. L’eau, ressource précieuse et fragile, mérite toute notre attention dans le monde de la construction de demain.

Tim

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