Pourquoi intégrer la biodiversité dans les projets de construction ?
Face à l’urgence écologique, l’intégration de la biodiversité dans les projets de construction n’est plus une option, mais une nécessité. L’étalement urbain, l’artificialisation des sols et la fragmentation des habitats menacent les écosystèmes depuis des décennies. Pour répondre à ces enjeux, les bâtiments doivent désormais devenir des leviers en faveur de la nature.
Adopter une approche respectueuse de la biodiversité permet non seulement de limiter les impacts négatifs liés au développement urbain, mais également de générer des bénéfices écologiques, sociaux et économiques. Créer des bâtiments favorables à la nature, c’est aussi améliorer la qualité de vie des usagers, favoriser la résilience urbaine face au changement climatique et accroître la valeur immobilière des équipements construits.
Les principes d’un bâtiment favorable à la biodiversité
Un bâtiment favorable à la nature repose sur une conception centrée sur la coexistence entre l’humain et les espèces vivantes. Cela implique de prendre en compte la biodiversité dès la phase de conception du projet immobilier, puis tout au long de son cycle de vie.
Les éléments clés pour favoriser la biodiversité en architecture sont :
- Réduction de l’artificialisation des sols : limiter l’emprise au sol, perméabiliser les surfaces pour favoriser l’infiltration de l’eau et maintenir le vivant.
- Favoriser les continuités écologiques : préserver et reconstituer les trames vertes et bleues (végétation et réseaux hydriques) à travers le bâti.
- Intégrer des habitats pour la faune : installation de nichoirs pour oiseaux, hôtels à insectes, murs végétalisés et toitures végétales.
- Préserver la flore locale : favoriser les plantations indigènes et adapter les espaces verts aux conditions locales, sans recours excessif à l’entretien ou à la consommation en eau.
Des solutions concrètes pour intégrer la nature dans l’architecture
Les innovations dans la conception écoresponsable des bâtiments permettent aujourd’hui une réelle synergie avec la biodiversité. Voici quelques pistes concrètes pour y parvenir :
Les toitures et façades végétalisées
Les toitures et façades végétalisées représentent une solution de plus en plus adoptée dans les projets urbains durables. Elles limitent les îlots de chaleur urbains, retiennent l’eau de pluie, améliorent l’isolation thermique et phonique, et créent des milieux de vie pour les insectes et oiseaux.
Les surfaces perméables et jardins de pluie
Implanter des matériaux perméables dans la construction permet de restaurer le cycle naturel de l’eau et de lutter contre le ruissellement. Les jardins de pluie, conçus pour récolter et filtrer les eaux pluviales, sont également bénéfique pour les pollinisateurs, tout en réduisant la pression sur les réseaux d’assainissement.
Les nichoirs, gîtes et corridors écologiques
Intégrer des dispositifs spécifiques pour la faune dans les murs, toits ou les interstices du bâti permet l’accueil de nombreuses espèces (chauves-souris, hirondelles, abeilles solitaires…). Par ailleurs, la création ou le maintien de corridors écologiques est essentielle pour la circulation des espèces dans le paysage urbain.
Normes, certifications et labels : vers une reconnaissance officielle de la biodiversité
La prise en compte de la biodiversité dans le BTP est encouragée par des labels et certifications environnementales.
- Label BiodiverCity® : lancé en 2013 par le CIBI (Conseil International Biodiversité & Immobilier), ce label promeut la prise en compte active de la nature dans les projets de construction et de rénovation urbaine.
- HQE – Haute Qualité Environnementale : cette certification intègre un pilier “Écologie” avec un volet “Écosystèmes”.
- Effinergie+ et BEPOS : bien qu’ayant un champ axé sur la performance énergétique, ces labels prennent également en compte les aspects de développement durable, dont la biodiversité.
De plus, la loi Climat et Résilience impose désormais, via l’article 194, que tout projet d’urbanisation de plus de 1 000 m² d’emprise au sol inclue une surface végétalisée ou un système de compensation équivalent. C’est un pas significatif vers des villes plus vertes.
L’économie circulaire et les matériaux écologiques au service du vivant
L’usage de matériaux biosourcés ou recyclés contribue indirectement à la préservation de la biodiversité. En favorisant des circuits courts, en limitant les émissions de CO2 ou la consommation de ressources fossiles, ces matériaux diminuent la pression sur les écosystèmes.
Par ailleurs, leur capacité à être biodégradables ou à faible impact toxique protège la faune et la flore environnante. Le bois certifié PEFC ou FSC, les isolants en chanvre, lin ou fibre de bois, ainsi que les enduits à base d’argile permettent de conjuguer performance thermique et faible empreinte écologique.
Des exemples d’initiatives inspirantes
Des projets pionniers montrent la voie vers un urbanisme réellement intégré à la nature :
- La Tour To-Lyon à Lyon, conçue avec des étages végétalisés et une toiture accessible à la faune urbaine, obtient le label BiodiverCity®.
- Le projet “Nature Urbaine” à Paris sur le toit du Parc des Expositions de la Porte de Versailles est aujourd’hui une des plus grandes fermes urbaines en toiture d’Europe.
- Le siège de la Métropole de Lyon à la Confluence, avec ses espaces verts accessibles, ses corridors pour la faune et ses bassins de rétention naturels, est un modèle de bâtiment résilient et biodiversifié.
Les bénéfices pour les citoyens et les collectivités
Un cadre de vie attractif, une meilleure santé mentale, une lutte plus efficace contre les canicules urbaines : les bienfaits des bâtiments intégrant la biodiversité sont multiples pour les habitants.
Les collectivités territoriales, quant à elles, peuvent répondre aux exigences réglementaires tout en valorisant leur territoire. Elles renforcent leur attractivité en proposant une qualité de vie augmentée et une urbanisation mieux maîtrisée.
Pour les promoteurs immobiliers et les architectes, intégrer la biodiversité permet non seulement de se démarquer sur un marché de plus en plus concurrentiel, mais aussi d’anticiper les réglementations futures et de capter une clientèle éco-sensible, en plein essor.
Vers un changement culturel dans le secteur du bâtiment
Changer les pratiques du bâtiment pour intégrer la biodiversité demande non seulement une volonté politique et économique, mais aussi une transformation culturelle. Il s’agit de repenser la ville et ses infrastructures comme des écosystèmes à part entière.
Cela passe par la formation des professionnels du BTP aux enjeux de la nature en ville, par des politiques publiques incitatives, mais aussi par la sensibilisation du grand public aux avantages de bâtiments plus verts, plus sains, et plus vivants.
Chaque projet architectural peut devenir une opportunité de restaurer la biodiversité locale. L’enjeu n’est plus de “faire moins mal”, mais de “faire mieux”, en reconnectant l’humain à son environnement naturel tout en répondant aux défis climatiques et sociaux de demain.
